A la différence des instruments à cordes pincées (guitare) ou frappées (piano), le violon, représentant des instruments à cordes frottées, est le lieu non pas d'une oscillation libre mais d'une auto-oscillation. Cette dernière est produite par une source d'énergie continue, mouvement rectiligne et lentement variable de l'archet, et par un système bouclé comprenant une non-linéarité. C'est la variation du frottement avec la vitesse relative archet-corde, non-linéarité localisée au niveau de leur interaction, qui permet de transformer la source continue en oscillation.
Lorsqu'on étudie la physique du violon et des instruments de musique en général, on est rapidement confronté au "danger" de confondre l'univers des possibilités musicales avec celui des possibilités du monde de la physique. Prenons l'exemple de la stabilité du mouvement principal de la corde frottée, alternance entre deux vitesses constantes pour la corde, associé à un phénomène d'adhérence-glissement ("stick-slip"). Expérimentalement nous savons qu'il est stable et tout violoniste sait qu'une fois la note démarrée il peut continuer à la jouer et qu'aucune perturbation infinitésimale ne viendra la perturber. Si l'on applique la même logique au mouvement de corde frottée, on arrive à la conclusion plus qu'embarrassante que théoriquement, le mouvement de corde frottée est toujours instable.
Lors de la première partie de cette présentation nous reviendrons sur le problème de la stabilité étudié à partir d'un dispositif expérimental développé à l'Ircam, baptisé "archet numérique ", et permettant de reproduire les mouvements de corde frottée. Ce dispositif a permis de souligner les facteurs omis dans notre modèle comme la largeur finie de l'archet, la présence de mouvement de torsion de la corde en plus du mouvement transverse, la vibration propre de l'archet...
Peu de recherches portent actuellement sur l'étude de ces problèmes en rapport avec la stabilité du mouvement de corde frottée. On peut donc affirmer que la stabilité de la corde frottée reste une question ouverte.
Dans la deuxième partie seront abordés des points plus liés à des problématiques musicales comme le couplage corde-caisse qui peut conduire à des notes pathologiques, difficiles à émettre, comme les "notes de loup" bien connues par les violoncellistes. Nous détaillerons également le rayonnement de ce système complexe qu'est la caisse du violon et la difficulté de la reproduction avec des moyens de diffusion traditionnels comme les haut-parleurs. L'analyse du geste de l'instrumentiste-expert pour contrôler à l'aide de trois paramètres (position, vitesse et "pression" d'archet) l'oscillation et produire le son recherché et sa modélisation pour piloter la synthèse par modélisation physique seront abordés pour clore la présentation.
Un café+croissant sera servi dans le hall à partir de 10h45.
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